En 2011 au Canada, on estime à 23 400 le nombre de femmes qui recevront un diagnostic de cancer du sein et à 5 100 le nombre de celles qui en mourront. En moyenne, chaque jour, 64 Canadiennes apprendront qu'elles sont atteintes du cancer du sein et 14 Canadiennes mourront des suites de la maladie. Une femme sur neuf risque d'avoir un cancer du sein au cours de sa vie. Une femme sur 29 en mourra. Le 16 décembre 2011, je suis devenue officiellement une des 23 400 femmes ayant un diagnostic de ce cancer. En 2021, on estime que 229 200 Canadiens recevront un diagnostic de cancer et que 84 600 décèderont du cancer.


samedi 28 janvier 2012

Après l'opération

Pour ceux qui arrivent sur ce blogue pour la première fois, je suggère de commencer par le début. Et pour vous éviter de chercher dans les archives, dont la chronologie est inversée, j'ai mis les liens ci-dessous :

Page 1.  2012/01/14  Un orage sur l'océan
Page 2.  2012/01/15  La veille
Page 3.  2012/01/26 Aujourdhui 26 janvier




Retour sur le 16 janvier


Le réveil post opératoire est très particulier. Avant que les souvenirs ne refluent, on passe d’un point néant à un stade sonore avant même de retrouver le sens du toucher. Des voix envahissent petit à petit mon espace, imprécises, flottantes, jusqu’à ce que les mots prennent un sens et que, finalement, je comprenne que quelqu’un m’appelle.

J’émerge tandis qu’autour de moi je capte des présences floues, le temps d’une mise au point mentale qui redonne à chaque chose sa réalité.

Cet après-midi du 16 janvier, la première sensation bien tangible est la douleur. L’impression d’être prise en traître, sans défense contre un coup de stylet irradiant dans la poitrine et le bras. Douleur à peine exprimée, aussitôt soulagée. Bien sûr, la notion du temps n’appartient pas à cet univers cotonneux d’un entre deux mondes où s’opposent conscience et inconscience. Mais l’intervention efficace de l’ange blanc m’a semblé rapide.

Je suis repartie pour un nouveau somme m’apprendra-t-on plus tard. Laissée à mon propre rythme, c’est la patience de mon accompagnateur qui est sollicitée. Au réveil, j’ai l’apparence d’un être lucide, mais les souvenirs ne sont pas vraiment fidèles. Habillement, chaise roulante jusqu’à la sortie, froid de l’extérieur, trajet familier pour retourner à la maison. Repas dont je ne me souviens pas, confort du fauteuil et sans doute bien d’autres détails oubliés ponctués à heure fixe par la prise des médicaments. Rien de lourd : 500mg d’acétaminophène aux 6 heures, 1mg de morphine aux 4 heures.

Revenir

Les premiers jours et nuits coulent en douceur. Ou je dors ou je regarde la télé. Je tente de lire et d’écrire mais la tête est dans la brume. Je ne veux ni réfléchir à l’avenir, ni faire le bilan du présent. Ce qui m’obsède c’est la perspective d’une vraie douche qui sera possible une fois les pansements enlevés.

Lors de la visite pré-opératoire, Tony m’a transmis un nom précieux. Celui d’une infirmière oncologue désignée pour les cas de cancer du sein. J’ai son numéro de téléphone et celui de son téléavertisseur. Elle est là en tout temps pour répondre à mes questions, me conseiller au besoin, être attentive à mes angoisses. Si elle est absente, comme ce fut le cas pour Karine, quelqu’un d’autre la remplace. Aucun appel n’est resté vain. J’ai toujours eu un retour à mes messages laissés dans sa boîte vocale. C’est beaucoup. Cette présence mise à ma disposition est rassurante. La savoir là m’enlève toute peur de déranger du personnel sur-occupé pour des questions futiles sur le pansement, ou essentielle sur les assauts d’une forte douleur au bras gauche tandis que la réserve d’anti-douleur touche le fond.

Dès le vendredi, je limite les médicaments à trois puis à deux par jour. Et j’entreprends les exercices conseillés pour redonner au bras sa mobilité. J’ignore tout de l’opération. Il faut compter de 10 à 15 jours pour avoir les résultats des analyses et ma rencontre avec mon chirurgien est prévue pour le 31.

Fêlure en la demeure

Mieux je vais, plus s’insinuent les questions. Je crois que chaque jour « après » me mène quelque part. Sauf que ce lieu m’est inconnu.

Je me consolais de mon peu d’énergie par la sensation de sentir aussi s’éloigner la douleur. Illusion! Le soir quatre, une main invisible serre mon bras si violemment que la douleur provoque un mal de tête carabiné et des nausées. J’ai l’impression d’avoir une balle de golf sous le bras, une sensation d’un froid intense et je ne sais pas quoi faire pour que cela arrête.

Je n’entends ni ne vois les attentions et les mots rassurants de mon compagnon. Dans l’immédiat, je me sens frappée et désarmée. Ma raison elle-même s’est esquivée face à l’emprise d’un orage intérieur. Est-ce désormais cela ma vie? Comment vais-je pouvoir affronter les prochains mois et son cortège de mal-être que risque de provoquer la chimio et la radiothérapie? La laideur des cicatrices ajoute à mon désarroi devant ce qui reste de ce corps jadis triomphant.

Un tourbillon d’émotions plus négatives les unes que les autres m’enveloppe. Je m’isole pour ne pas voir la tristesse et l’inquiétude du regard de l’autre. Quelque chose se fissure en moi.

Heureusement, mon orgueil est plus grand que ma faiblesse. Je m’ordonne d’arrêter cette descente. Une bonne douche froide fait le reste.

-    Je suis moins forte que je ne le crois, dis-je à mon homme en retrouvant le refuge de ses bras.

Quelques réponses

Sept jours après l’opération, je savoure mes plaisirs de la marche et de la lecture. Deux jours plus tard, je dépense l’énergie retrouvée sur mon clavier. Et le 27 janvier, grande sortie en ville : rencontrer mon radio oncologue, Marc-André Brassard, récipiendaire du prix César-Galéano. Belle rencontre!

Enfin quelques réponses! L’espoir est grand. L’hiver, le printemps et l’été ne promettent pas des fleurs pour autant. Risque de pleurs à l’horizon. Je me projette en automne où tout cela sera peut-être derrière moi.

J’en saurai plus mardi le 31, après avoir revu MON chirurgien.

Ce soir, je suis calme. Je profite de chaque instant. Les présences tendres. Les rires complices. Mes points d’interrogations sont interdits de séjour jusqu’à mardi. 

***
à suivre


2 commentaires:

  1. Via FB : Récit émouvant, bien écrit. Mes voeux les plus profonds pour un prompt rétablissement. Ton récit sur ton blog m'a impressionné! Pleins de bonnes choses pour toi Christiane en ces moments pas faciles à vivre. Ca va aller! Bisous de Belgique.
    François Vanantwerpen

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  2. Simone Vanantwerpen29 janvier 2012 à 12:16

    Via FB : JE SUIS SINCEREMENT EMUE ET TRISTE DE CE QUI T'ARRIVE ET JE TROUVE QUE TU AS UNE FORCE ENORME RIEN QUE PAR LE FAIT D'ACCEPTER CE MOT REDOUTABLE ET DEVASTATEUR ET DE TENIR LE COUP FACE AUX TIENS....ALORS QUE LES MOTS ME MANQUENT JE VEUX QUE TU SACHES QUE JE PENSE A TOI ET QUE JE TE SOUHAITE PLEIN DE FORCE MORALE POUR AFFRONTER CE CRABE ET LE VAINCRE AVEC TOUS LES MALAISES QU'IL TE DONNERA..PLEIN DE BONNES CHOSES POUR TOI ET TU VERRAS TU ES UNE BATTANTE ET TU ARRIVERAS A TRIOMPHER....LES LAFORGE SONT DES CHENES....PLEIN DE COURAGE A TOI COUSINE ET TU T'EN SORTIRAS. JE SAIS QUE RIEN NE SERA FACILE ET QUE LA DOULEUR SERA GRANDE MAIS CA VA ALLER;GARDES CONFIANCE...BISES AFFECTUEUSES A TOI; JE NE T'OUBLIE PAS ; SIMONNE....

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